Affection de Longue Durée (ALD) : définition et enjeux

La Sécurité sociale désigne sous le terme d’Affection de Longue Durée (ALD) des maladies graves nécessitant des soins coûteux ou prolongés, dont le cancer fait partie (article L. 324-1 du Code de la Sécurité sociale). Être reconnu en ALD pour un cancer signifie que les soins en lien direct avec la pathologie sont pris en charge à 100 % sur la base des tarifs de la Sécurité sociale, allégeant ainsi une grande partie du reste à charge pour le patient, notamment en cas de traitements lourds ou prolongés (Sources : ameli.fr, Assurance Maladie).

  • Prise en charge à 100 % : consultation, chimiothérapie, radiothérapie, examens, suivi…
  • Droits complémentaires : accès facilité aux dispositifs d’arrêt de travail, suivi infirmier, aide à domicile sous conditions…
  • Durée : la plupart des cancers bénéficient d’une ALD renouvelable, généralement pour une période de 5 ans, réévaluée si besoin.

En 2022, plus de 2 millions de personnes étaient reconnues en ALD pour une pathologie cancéreuse selon l’Assurance Maladie (source ameli.fr).

Le cadre légal : liste des cancers concernés

L’ALD dite "ALD 30" liste 30 maladies, dont la quasi-totalité des cancers (tumeurs malignes, leucémies, lymphomes), quel que soit le pronostic initial. Sauf exception, tous les cancers figurent dans cette liste, y compris lors d’une récidive ou de la survenue de séquelles importantes. À noter : certains cancers précoces, à faible risque, peuvent parfois faire l’objet d’un examen particulier par le médecin-conseil de la Caisse d’Assurance Maladie.

  • Tumeurs solides (sein, poumon, prostate, estomac…)
  • Cancers hématologiques (lymphome, leucémie, myélome…)
  • Cas de cancers pédiatriques (prise en charge spécifique et prioritaire, y compris pour les séquelles à l'âge adulte, Source : INCa)

La démarche s’applique aussi bien pour les cancers traités par chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie, thérapies ciblées… que pour ceux nécessitant un suivi rapproché sur plusieurs années.

Quelles démarches pour obtenir la reconnaissance en ALD après un cancer ?

Étape 1 : L’initiative du médecin traitant

Le médecin traitant est la pierre angulaire du dispositif. C’est lui qui rédige la demande de protocole d’ALD, le plus souvent lors de l’annonce du diagnostic ou dès la planification des premiers traitements. Parfois, c’est un spécialiste hospitalier qui initie la démarche mais il revient au médecin généraliste d’en assurer le suivi.

  • La demande s’effectue généralement sur le formulaire Cerfa n° 11626*06 ("Protocole de soins").
  • Le médecin précise les soins rendus nécessaires par le cancer et les éventuelles pathologies associées (diabète, maladies cardiovasculaires…)
  • Le patient doit signer le protocole, signifiant qu’il en a pris connaissance.

Étape 2 : Envoi et instruction par l’Assurance Maladie

Le dossier est envoyé par le médecin (digitalement ou par papier, selon les cas) au service médical de la Caisse d’Assurance Maladie (CPAM). L’instruction du dossier peut être rapide, surtout pour les ALD dites « de liste », parmi lesquelles les cancers.

  • Un retour de décision intervient généralement sous 15 jours à 3 semaines.
  • En cas d’urgence, la décision peut être accélérée et appliquée rétroactivement à la date du diagnostic.

Étape 3 : Notification et droits ouverts

Une fois l’ALD acceptée, le patient reçoit une notification écrite. La carte Vitale est automatiquement mise à jour lors de la prochaine utilisation en pharmacie ou chez un professionnel de santé, précisant l’exonération du ticket modérateur pour les soins en lien avec le cancer.

  • Le protocole de soins mentionne la durée de votre ALD (souvent 5 ans pour un cancer, ajustable selon l’évolution).
  • Le médecin traitant conserve la responsabilité du renouvellement ou des modifications du protocole.

Quels documents fournir et à quel moment ?

Le montage du dossier est relativement simple, mais certains points facilitent la démarche :

  • Justificatifs médicaux : Compte rendu anatomopathologique, bilan d’extension, traitements prévus… sont à fournir par le médecin.
  • Identité du patient et droits ouverts : S’assurer que la carte Vitale ou une attestation de droits soit bien à jour.
  • Consentement : Signature obligatoire du patient sur le protocole.

La demande d’ALD doit être réalisée le plus tôt possible, dès l’annonce ou dans les tout premiers temps du parcours de soins. Cela garantit une continuité de prise en charge sans interruption de droits. À noter, il est possible de faire reconnaître une ALD à titre rétroactif sous certaines conditions, notamment lorsque le diagnostic a précédé un séjour à l'hôpital.

Quels bénéfices concrets pour la personne atteinte de cancer ?

L’ALD est un levier efficace pour diminuer le poids financier de la maladie. Mais ses avantages vont au-delà :

  • Accès à 100 % de prise en charge pour la quasi-totalité des examens et soins relatifs au cancer (hors dépassements d’honoraires).
  • Dispense d’avance de frais souvent généralisée via le tiers-payant.
  • Accès facilité à certaines aides sociales (allocation journalière de présence parentale, aide à domicile, prise en charge du transport…).
  • Reconnaissance légale d’une situation ouvrant indirectement l’accès à d’autres dispositifs (invalidité, aides MDPH si besoin, dispositifs de retour à l’emploi…)

Par exemple, dans le cas des cancers du sein, 96 % des patientes bénéficient d’une ALD dès la première année du diagnostic (Source : Santé publique France, 2022).

Cas particuliers et situations complexes

Cancer et autres pathologies : ALD « de liste » ou « hors liste »

Si le patient présente plusieurs maladies chroniques, il peut bénéficier de plusieurs ALD simultanées (ALD de liste pour le cancer, voire une ALD « hors liste » pour une situation complexe comme des effets secondaires lourds ou associés à un autre handicap).

Cancers guéris ou en rémission prolongée

Le statut d’ALD peut être réévalué, voire levé, au terme de plusieurs années sans signe de rechute avérée. La décision appartient au médecin-conseil et au médecin traitant, en concertation avec le patient.

Difficultés ou refus de reconnaissance

  • En cas de refus de l’ALD, il est possible de demander un recours amiable auprès de la commission de la CPAM.
  • L’accompagnement par une assistante sociale, un patient-expert ou les associations spécialisées (plateformes locales de l’INCa ou Ligue contre le Cancer, INCa) peut s’avérer précieux dans ces démarches.

Droits complémentaires : transport, examens, soutien social

Certaines prises en charge complémentaires sont conditionnées à l’obtention de l’ALD :

  • Transports médicaux : Pour les traitements à distance (chimiothérapie, radiothérapie, hospitalisation…), le médecin peut prescrire un transport assis ou en ambulance pris en charge à 100 %.
  • Arrêts maladie et invalidité : Les arrêts sont indemnisés selon un régime spécial pour les personnes en ALD ; possibilité sous conditions d’un congé de longue maladie pour les agents publics, ou d’une pension d’invalidité.
  • Accompagnement social : De nombreux dispositifs complémentaires existent au niveau local (CCAS, associations, plateformes d’accompagnement régional comme Onco-Île-de-France).

Ressources et interlocuteurs utiles

Pour accompagner la démarche d’ALD, plusieurs ressources locales et nationales sont à connaître :

  • Le médecin traitant : interlocuteur central.
  • Assistantes sociales hospitalières : pour orienter vers les dispositifs sociaux, aides financières, accompagnement administratif.
  • Institut National du Cancer (INCa) : Informations, conseils et droits des patients.
  • La Ligue contre le Cancer : écoute, orientation vers un accompagnement de proximité, dispositifs solidaires en Île-de-France.
  • Services sociaux des mutuelles complémentaires.
  • Associations de patients : Unicancer, Espoir Cancer, Vivre Comme Avant…

Pour aller plus loin : conseils pratiques et points de vigilance

  • Conservez un exemplaire papier et/ou numérique du protocole de soins, utile lors de démarches administratives ou pour les autres professionnels de santé.
  • Pensez à faire régulièrement le point avec votre médecin sur la liste des soins pris en charge dans le cadre de l’ALD, notamment à l’occasion d’un renouvellement du protocole.
  • En cas de déménagement ou de changement de situation, informez votre CPAM pour éviter toute rupture de continuité des droits.
  • Des ateliers « droits des malades » existent dans plusieurs hôpitaux franciliens (à demander au service d’oncologie ou à la plateforme d’accompagnement locale).
  • Pour toute question juridique ou litige, il est possible de contacter le service social ou la Défenseure des droits.

Regarder l’après ALD : accompagnement sur le long terme

Un cancer ne s’arrête pas à la fin des traitements. Le maintien ou la réévaluation de l’ALD, la coordination avec les médecins, l’accès aux aides sociales et le soutien psychologique restent essentiels bien après la rémission. Il est donc utile de rester en lien avec les professionnels de santé et les associations spécialisées qui connaissent les spécificités du parcours de soins en Île-de-France.

Pour toute démarche concernant l’ALD pour un cancer, n’hésitez pas à solliciter un accompagnement. La plupart des hôpitaux disposent d’un service social dédié, et de nombreuses associations offrent un accompagnement individuel ou collectif pour aider à faire valoir vos droits.

Sources principales : Ameli.fr, Institut National du Cancer, Santé publique France, Ligue contre le Cancer.

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